C’est à cette question que je
tenterai de répondre dans le billet de cette semaine. Avant de prendre position
sur la conférence animée par Salman Khan, je vous invite à la visionner.
Pour ceux
qui n’ont pas le temps de regarder la vidéo, voici le résumé de la conférence
repéré au lien ci-dessus :
«Salman
Khan parle du pourquoi et du comment de la création de la remarquable Khan Academy, une collection
soigneusement structurée de vidéos éducatives qui
offrent un programme complet en mathématiques, et, maintenant, dans d'autres domaines. Il démontre le
pouvoir des exercices interactifs, et appelle les enseignants à réviser le contenu d'une classe traditionnelle --
en donnant aux étudiants des
conférences vidéos à regarder à la maison, et en faisant les "devoirs" dans la salle de
classe avec l'enseignant disponible pour apporter de l'aide.»
À la suite du visionnement de la
conférence, j’ai dégagé deux pratiques principales dans le programme proposé
par Khan, soient les vidéos éducatives regardées à la maison et les exercices interactifs
faits en classe sous la supervision de l’enseignante. Étant étudiante au
Baccalauréat en adaptation scolaire, l’éducation des élèves handicapés ou en
difficulté d'adaptation ou d'apprentissage (HDAA) a évidemment eu une influence
sur ma prise de position.
Je crois que le programme d’enseignement
proposé à la Khan academy peut
effectivement réinventer le monde de l’enseignement auprès de l’éducation des
adultes, des élèves du secteur régulier dans les écoles primaires et
secondaires ainsi que pour les enfants qui font l’école à la maison. Pour
profiter de cette technologie, les apprenants doivent être autodidactes ainsi
que faire preuve de maturité, de motivation, d’organisation et d’autonomie.
Vraisemblablement, ce sont des
habiletés que l’on retrouve rarement chez les élèves HDAA. C’est pourquoi mon
opinion est plutôt nuancée en ce qui concerne l’application du programme de M.
Khan auprès de ces élèves.
D’une part, je constate que les vidéos
éducatives que les élèves doivent regarder à la maison ne sont pas du tout
appropriées à l’enseignement des différents concepts à l’étude. Voici mes
arguments :
- Il n’y a pas de possibilités de
différenciation des apprentissages; tous les élèves visionnent la même vidéo.
- L’élève n’est pas actif dans son
apprentissage. Vienneau (2011, p.181) explique l’importance de l’activité et du
contact direct avec l’environnement chez l’apprenant qui «doit construire
activement ses connaissances par des manipulations, des mises en situation, des
expériences diverses dans l’environnement scolaire et dans son milieu de vie.»
Le simple visionnement d’une vidéo ne permet pas tout cela.
- Avez-vous déjà observé un enfant
qui regarde un écran de télévision ou d’ordinateur? L’enfant devient amorphe,
la bouche ouverte et les yeux vitreux. Il semble être absorbé dans un autre
monde. Il subit la vidéo au lieu de vivre l’apprentissage. À long
terme, cela ne peut pas être bénéfique pour son apprentissage.
- Une vidéo ne pourra jamais remplacer
l’être humain. C’est la chaleur, la présence et le soutien d’un enseignant ou d’une
enseignante que l’élève HDAA a besoin lorsqu’il effectue un apprentissage.
- Aucune rétroaction directe ne
peut être donnée à l’élève lors de l’apprentissage puisqu’il se trouve à la
maison devant une vidéo qui défile sans s’arrêter pour répondre à ses questions.
D’autre part, je soutiens que les
exercices interactifs effectués en classe sont adaptés et adaptables aux élèves
d’une classe d’adaptation scolaire. Voici mes arguments :
- Comme l’enseignement de la
matière ce fait à la maison, l’enseignante a plus de temps en classe pour la
pratique. Elle peut prendre le temps d’observer les élèves et de soutenir ceux
qui en ont le plus besoin.
- L’élève chemine à son propre
rythme dans les exercices qui lui sont proposés. Le système est programmé de
telle sorte que l’apprenant doit réussir une série de 10 exercices avant de
passer à la prochaine. Le niveau de difficulté augmentant d’une série à l’autre.
Suivre le rythme d’apprentissage de chacun est bénéfique pour tous les élèves,
spécialement pour ceux des classes d’adaptation scolaire.
- Grâce au tableau
des apprentissages et aux différents graphiques, l’enseignante est facilement
au courant du cheminement des élèves. Elle peut donc rapidement identifier les
élèves qui éprouvent des difficultés et leur apporter du support.
- Aussi, l’élève peut voir sa
progression et toutes les réussites qu’il a effectuées. Cela est extrêmement
motivant et bon pour l’estime de soi de l’apprenant. Les élèves en difficulté
ont souvent une image négative d’eux-mêmes et les différents échecs auxquelles
ils doivent faire face minent leur motivation. (St-Laurent, 1995) Or, ce sont
deux aspects très importants dans la réussite scolaire.
- Dans le tableau des
apprentissages, l’enseignant peut en profiter pour regrouper un élève qui a de
la difficulté dans un concept (rouge) avec un élève qui n’en éprouve pas (vert).
Le tutorat par les pairs peut être bénéfique pour les élèves en difficulté qui sont
parfois plus habiles que les enseignants pour expliquer un concept qui échappe
à un élève. En effet, St-Laurent (1995) qualifie ce mode de regroupement comme
utile et efficace auprès des élèves à risque.
Voici le tableau des apprentissages
et les différents graphiques (captures d’écran de la conférence repéré à :
Graphique indiquant les problèmes réussis et ceux échoués.
|
Graphique indiquant la progression de tous les élèves de la classe dans
les modules à l’étude au fil des jours.
|
Graphique indiquant les minutes passées par les élèves à faire les
exercices et visionner les vidéos
|
Graphique indiquant les contenues des vidéos visionnées et des exercices
effectués.
|
Tout comme les approches, les programmes
d’intervention et les pratiques communes à la pédagogie, le programme de M.
Khan n’est pas différent. Il peut faire des miracles chez certains élèves alors
que pour d’autres, il les mène à l’échec. En tant qu’enseignante, il est
impératif de choisir les approches et les programmes qui sauront répondre aux
besoins et aux difficultés de nos élèves. J’ai bien aimé découvrir cette
nouvelle façon d’enseigner et c’est une autre connaissance que j’ajouterai à
mon coffre à outils d’enseignante!
Et vous, qu’en pensez-vous?
Partagez-vous la même opinion que moi?
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St-Laurent, L., Giasson, J.,
Simard, C., Dionne, J., Royer, É. Et collaborateurs. (1995) Programme d'intervention auprès des élèves à
risque : une nouvelle option éducative. Montréal : Gaëtan Morin
Éditeur.
Vienneau, R. (2011) Apprentissage et enseignement : théories et pratiques. Montréal :
Gaëtan Morin Éditeur.
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